samedi 4 décembre 2010

La Saintélyon par Arnaud BERNIER

Samedi 04 décembre, 14h14, gare de Rennes. Départ pour Saint Etienne, où nous attend la SaintéLyon. Un des monuments du trail en France.

Au menu de notre nuit à venir : un départ à 0h00, pour un trail de 68 kms, entre Saint Etienne et Lyon. 1300m de dénivelé positif, 1700m de dénivelé négatif.
Moitié du parcours sur chemins, l’autre moitié sur route. De quoi s’occuper !
Nous partons à 4 (Yann, Sam, Jean Marc et moi). L’idée de s’inscrire nous est venue (grâce à Yann) l’été dernier. Avec l’envie de partager une aventure ensemble, et de s’aligner sur une course réputée, « à faire une fois dans sa vie », comme ils disent, dans les revues. Sam et Yann ont l’habitude de ces efforts au long cours. Pour Jean Marc et moi, c’est le saut dans l’inconnu. Le vrai.
Le voyage jusqu’à Lyon se passe bien. L’ambiance est bonne, comme d’habitude, plutôt à la rigolade, même si les premières questions liées à la météo qui nous attend cette nuit commencent à poindre : nous savons depuis cette semaine que nous aurons jusqu’à 40 cms de neige par endroit, mais la grosse interrogation porte sur les températures attendues...
Entre -3°C et… -17°C selon les sites. De quoi ne pas faire les fiers...

Arrivée à Lyon, embarquement pour le train vers Saint Etienne : le TGV est bourré de coureurs, et les discussions entre nous commencent à se faire plus rares... Quelques échanges sur les allures et les objectifs. Jean-Marc et moi partions pour 8h / 8h30 en temps normal : pour le coup, on se dit que l’objectif sera de finir. Sans trop d’encombres tant qu’à faire, et surtout sans se fixer de grandes prétentions chronométriques.
Saint Etienne : nous y voilà.
Brice et Loris nous attendent pour nous emmener jusqu’au Parc des Expos de Saint Etienne : de précieuses minutes de gagnées !

20h00 : nous démarrons l’attente pour les dossards. Un monde fou (en comptant toutes les épreuves, c’est 11 000 personnes qui sont attendues cette nuit, dont 5700 sur l’épreuve reine, le raid solo de 68 kms). Direction ensuite la pasta party, puis nous nous habillons.
Le froid est là, la pression monte d’un cran, vérifier, re-vérifier son équipement, ses ravitaillements, remplir ses bidons, aller quinze fois aux toilettes.
H-20 minutes, direction la ligne. Il fait froid, nuit... Et une broutille de promenade en plein air de pas loin de 70 bornes qui nous attend... «Non, mais franchement, qu’est ce que je fais là ?!?»
A 1 minute du départ, derniers encouragements entre nous. Cette édition 2010 de la SaintéLyon s’annonce comme exceptionnelle de par les conditions météo dantesques dans lesquelles elle va se courir : on a l’impression de vivre un truc à part.
Mélange d’appréhension, de soif d’en découdre, de fierté d’être là.

TOP DEPART



5 700 personnes qui franchissent la ligne en s’encourageant. Impressionnant.
Nous partons tous les 5 (les 4 bretons et Loris, l’ami stéphanois de Sam). Yann part plus vite que nous, sans surprise, et au bout d’un kilomètre nous restons à 4. La route commence à s’élever. Un panneau nous indique qu’il fait -8°. En ville… ça promet du plus froid sur les crêtes.
Loris et Sam restent un peu en retrait, Jean-Marc et moi continuons tous les deux.
Les premiers kilomètres de course me permettent d’enlever la petite boule au ventre qui me tient depuis 23h, et de retrouver des sensations de coureur à pieds. Je freine un peu Jean-Marc : pas plus de 11 km/h sur le plat, on ralentit l’allure quand ça monte. Il faut absolument en garder pour jusqu’à demain matin, la nuit s’annonce longue.
On décide de la faire tous les 2, cette SaintéLyon. Quoiqu’il arrive.

8ème kilomètre : les premiers chemins arrivent. Des passages avec de la poudreuse jusqu’aux genoux, où il est impossible de courir, qui s’enchaînent avec des descentes, techniques, mais plutôt agréables dans la neige. Une vue magnifique sur le serpentin lumineux des frontales qui s’étend sur les crêtes des collines que nous traversons. On prend le temps d’en profiter… Ca y est, on est bien, heureux d’être là !
Premier ravitaillement à St Christo au bout d‘1h40. Jean-Marc doit s’arrêter en express faire le plein en eau (côté bouffe, il a 2 bonnes semaines d’autonomie :-), mais il est un peu juste en liquide), et on se perd de vue bêtement dans la tente.
Ca nous fait perdre quelques minutes, on repart. Le froid est saisissant après un arrêt de rien du tout : c’est décidé, nos pauses aux ravitaillements cette nuit seront les plus courtes possibles.

Passage au point culminant au 22ème km. C’est bon pour le moral, on tient un 9 km/h de moyenne, et les jambes répondent bien. Les passages où la marche s’impose (trop de neige pour courir, inutile de se griller les cuisses pour tenter de gagner 30 secondes sur un passage complètement impraticable), et où la route est la bienvenue pour les relances, s’enchaînent.

Arrivée à Ste Catherine en un peu plus de 3h pour 27 kms. Tout va bien.
On va attaquer la portion qu’ont empruntés en début de nuit les quelques milliers de participants à la version courte de la SaintéLyon (la SaintExpress). On espère qu’ils auront dégagé un peu les chemins, et que nous aurons moins de neige... 
Arrêt éclair une nouvelle fois, on décide de rejoindre le ravitaillement suivant, à mi course, pour refaire le plein en eau. De mon côté, je suis parti avec 60 cl d’eau et 60 cl de boisson énergétique : il m’en reste, ça devrait tenir.

Au départ de Sainte Catherine, belle montée pour aller chercher la crête, et basculer sur St Genoux. Aux premiers passages sur les routes, on se rend compte que la principale difficulté a changé de nature : de poudreuse, le danger s’est transformé en verglas. 8000 pieds qui dament de la neige par -10°C, ça dégage la poudreuse, c’est sûr, mais ça fait surtout... une patinoire ! Les chemins en sous bois et les petites routes sont impraticables : 4 gamelles pour moi sur cette portion, dont un magnifique triple axel boucle piquée, avec plat sur le dos, en pleine descente. A faire pâlir d’envie Brian Joubert, au moins en note artistique !
On voit quelques concurrents pris en charge par les secours : il va falloir être lucide jusqu’au bout, à chaque pas. Hors de question de relâcher l’attention, ou ça peut être le retour à Lyon en bus...
La moyenne s’en ressent : 1h10 pour faire les 10 kms depuis Ste Catherine jusqu’à St Genoux (bien nommé ce patelin). Arrêt au ravitaillement : bidons, vérification que tout est toujours en place dans le sac à dos après les chutes, que je n’y ai pas laissé trop de côtes flottantes... C’est tout bon, ça repart.
Place à la descente, ou du moins au Super Géant, pour arriver 1 heure après au ravito de Soucieu. Passage du marathon en 4h50, sans fatigue. Sans connaître non plus ce qui se passe après le 42ème km. Il est maintenant, le saut dans l’inconnu...
Voilà maintenant 5h15 qu’on court. On repart de Soucieu : ni mal aux jambes, ni coup de mou. On continue à discuter, on est bien, heureux d’être là. Ca rigole, ça chambre, on commence à se dire que oui, on va la finir, cette SaintéLyon.
Sauf accident, on y sera, à l’arrivée !
Jean-Marc commence à me dire que les 8h sont atteignables... Je ne préfère pas m’emballer : il nous en reste encore 23, des bornes, et quelques belles bosses. On reste sur la même moyenne, qui a baissé un peu : on ralentit à chaque virage, chaque portion de chemin.
Trop peur de se gameller. 
La tactique de course, elle aussi, reste la même : je régule les parties roulantes («Pas plus de 11, on gère»), et Jean-Marc les montées (en marchant, en essayant de tenir les 6 km/h de moyenne : les côtes, ici, c’est un joyeux mélange de cailloux, de boues, de glace. On ne s’enflamme pas !).
Les dernières difficultés s’enchaînent, tout se passe bien. Le dernier ravitaillement est là.

Brice, le frère de Loris, nous y attend : ça fait du bien au moral, ça commence à sentir bon.
Encore 11 bornes, et on y sera !



Passage au ravitaillement un peu plus long que d’habitude (peut être pour profiter du moment : c’est le dernier !). Les 8 heures sont toujours dans la tête de Jean Marc (6h55 au passage du panneau des 10 kilomètres).
On ne va rien lâcher, c’est sûr. Pas maintenant... Passée la dernière ENOOORME bosse (1,5 km, avec un passage à 20%), et sa sœurette la descente (aïe, elle fait mal celle là…), c’est l’arrivée sur les quais de Saône.

Passage du panneau des 5 kms et, devant nos yeux, le programme des derniers kilomètres : une gigantesque ligne droite (pas loin de 3 kms), verglacée, avec un vent de face aux rafales à plus de 50 km/h sans doute. L’horreur. Pas d’équilibre, aucun appui, et du vent glacial dans le nez : il va falloir qu’on se fasse mal jusqu’au bout... 
Les 2 derniers kilomètres sont là. On finit au train, on profite. 500m, 200m, 100m, 50m : on rentre dans le palais des sports de Gerland, on y est, c’est fait. 8h01’38’’ au chrono. 630ème et 631ème place !

On franchit la ligne d’arrivée main dans la main, heureux.

C’est vraiment pour vivre ces instants qu’on aime ce sport.
Le retour à Rennes sera plutôt calme, franchement détendu. On profite, c’est que du bonheur.
Et la discussion avant d’arriver en Bretagne portera naturellement sur… la prochaine course à faire ensemble ! 

Enorme merci à Brice, Loris et Mylène de leur accueil tout au long de ce week-end : la logistique, les encouragements avant, pendant, après, le steak haché / spaghettis / petits gâteaux tout secs du dimanche : tout était parfait !
Merci à tous pour vos encouragements, et en particulier à ma supportrice du quotidien, qui me « supporte », dans tous les sens du terme, moi et mes idées de week-end un peu saugrenues.

Et merci à vous 3, Yann, Sam, Jean-Marc : pour le plaisir de faire du sport ensemble, pour les entraînements passés, pour les courses qu’on a déjà eu l’occasion de partager, et… pour toutes celles à venir !

Arnaud

Le tableau des finishers

Nom
Place
Temps
Vitesse moy
LEBEAU, Jérôme
452
07:44:00
8,8 Km/h
BERNIER, Arnaud
637
08:03:47
8,4 Km/h
DEVILLE, Damien
776
08:16:00
8,2 Km/h
BODIN, Gilles
893
08:25:00
8,1 Km/h
KAHN, Sebastien
1819
09:24:00
7,2 Km/h
MOLLARET, Brice
1892
09:29:00
7,2 Km/h


L'origole 2010 : l'AS Groupe SFR dans la nuit et dans la neige. Par JF Magne.

Préambule :
J’entends déjà les commentaires :
« Encore un article de la section running ! Encore une épreuve dantesque, un truc de fou avec de la sueur et des cailloux, des muscles saillants et des efforts violents, sur la lutte allégorique du coureur de fond à la recherche de son moi le plus profond …
Non ! Nous formons un groupe hétérogène et, je cite le président (de la section), « Nous souhaitons convier au sein de cette section tous ceux qui aiment courir sans distinction de niveau, des coureurs du dimanche jusqu'aux mordus de l'asphalte, triathlètes et autres adeptes du trail de montagne. Ajoutons avec plaisir ceux qui souhaitent tout simplement rester en forme, s'arrêter de fumer ou bien encore perdre un peu de poids… ».


Et maintenant la course, l’Origole !
L’origole 2010 a eu lieu dans la nuit du 4 au 5 décembre dernier. Selon les coureurs elle est source de rêves ou de cauchemars, pour le charme et la variété des paysages traversés d’une part et pour les difficultés du tracé et des conditions.

Le parcours de l’ORIGOLE est basé sur la fleur du logo du Téléthon et comprend donc plusieurs boucles nature qui partent et reviennent en un point central au Perray en Yvelines.
C'est un parcours dans le Massif forestier de Rambouillet avec 92% de sentiers, avec traversées de rigoles, des Etangs et  bien sur du domaine des biches, cerfs, sangliers, lièvres… La course passe notamment par le Château des Mesnuls et fait le tour de l’Abbaye des Vaux de Cernay.
Pour la difficulté …, la course nocturne  d’une distance de 76 km offre un dénivelé positif de 2000 m et des chemins enneigés qui ressemblent souvent à des rizières ; le tout sous une température de saison.Les acteurs :
Sébastien, Jean-Félix et moi tentons l’aventure. Arrivés un peu avant 22H nous prenons nos marques dans le gymnase du Perray en Yvelines transformé en camp retranché pour trailers. Chacun est absorbé par les préparatifs de dernière minute : remplir le camelback, vérifier la lampe frontale, la répartition des réserves de nourriture.
Petit briefing sur le tracé, le balisage réfléchissant et les chemins glissants

Les 3 taupes au départ, par -3°c
Première  boucle, Orlande 28,5 km 660 m D+
A 23H le départ est donné sur la place de la mairie et c’est une cohorte de 200 loupiotes qui s’élancent dans la nuit. Jean-Félix rejoint le groupe de tête, … nous ne le reverrons qu’à l’arrivée !
La ballade est sympathique ! Bien couverts le froid relatif est agréable, les chemins enneigés sont praticables et après une dizaine de km nous débouchons sur le château des Mesnuls.
C’est ensuite un parcours un peu vallonné dont les lacets scintillent au rythme de l’avancée des coureurs, et les premières glissades dans les descentes. Tout en discutant nous trottons gentiment pour rejoindre le gymnase. Les jambes sont tout de même un peu lourdes. Il est 2H30
Arrivés au point de ravitaillement nous ne nous laissons pas griser par la douce chaleur de l’endroit et filons une fois ravitaillés en eau et nourriture.
René la taupe, si mignon mignon mignon ...
2 La boucle du Coupe Gorge 22,5 km 270 m D+…
Sur le papier pas de difficulté majeure : peu de distance et de dénivelé. C’est compter sans la fatigue qui commence à s’installer et le terrain lourd. Le chemin détrempé sillonne en forêt de Rambouillet et l’on peine à retrouver le rythme gaillard du début tant est grande l’impression de courir dans un labyrinthe de boue jalonné de fossés. Nous rencontrons un concurrent esseulé et compagnon de mauvaise fortune nous nous relayons pour rallier le gymnase pour la seconde fois.
Le moral a pris une grosse claque, il est 5H20.
Nous prenons là un peu plus de temps pour rassembler nos forces puis quittons pour la troisième fois le gymnase vers la nuit froide. Au bout d’une centaine de mètres Sébastien, saisi de tremblements, est obligé de retourner au gymnase. Le froid, la fatigue et les 50 km déjà parcourus auront eu raison de lui. Chaque année c’est ainsi plus de la moitié des coureurs qui ne peuvent terminer cette course exigeante, moteur cassé …
 
Tru-Tru en Robocop
3 La boucle d’Artoire 24,5 km 1 050 m D+…
A part l’envie d’en finir les sources de motivation sont plutôt minces à cet instant. Il fait froid, nuit et nous sommes fatigués et plus très nombreux, les quelques 200 participants sont éparpillés dans la nature et certains ont choisi de rester au chaud au Perray. Et puis miracle, après quelques km je rallie un petit groupe et en discutant l’envie revient et nous rejoignons à bon rythme les vaux de Cernay. Là l’organisation s’en est donné à cœur joie en traçant le chemin en dépit des courbes de niveau et en ajoutant même quelques surprises : baignoires de boue, ponts improvisés, troncs à enjamber ou à éviter ….
Donc quelques heures de montagnes russes où nous alternons course et marche au gré de la pente et de notre forme. Le jour finit par se lever découvrant au cœur du relief accidenté l’abbaye des Vaux de Cernay. C’est vrai que c’est beau mais mon dieu que c’est dur, … Elle finit quand cette forêt ? je veux retrouver le bitume !
Dernier point de contrôle on nous annonce encore 3 à 4 km qui chahutent avant 6 km de plat. Ce ne sont pas les km de course à pied les plus glorieux de ma carrière, on est assez loin des chariots de feu. J’avance péniblement dans les montées, me laisse glisser dans les descentes, et tente une avancée à pas cadencé sur les derniers kilomètres de plat.
Oh ce bonheur de croiser une route, de voir des maisons, puis un organisateur qui m’annonce qu’il ne reste plus que quelques centaines de mètres ! Je cours pousse la porte du gymnase un peu avant 10h et salue la foule en délire. Une vingtaine de personnes qui m’accueillent et me congratulent et notamment Jean-Félix qui est là depuis près de deux heures et a réussi à accrocher le podium …
Une heure après douché, nourri, réchauffé je pars affronter la seconde épreuve de la journée l’Ecopark de willi !
 
Le podium pour Félix Ze Coach
Conclusion :
La question doit venir aux lèvres de certains d’entre vous. Quelle idée d’aller courir dans les bois pendant 76 km et qui plus est de nuit ! La réponse la plus évidente est le plaisir, celui de relever un défi, de se dépasser, de mettre en pratique stratégie et préparation physique fourbies depuis plusieurs semaines et enfin de partager ce plaisir au sein d’une communauté fort sympathique, celle des coureurs à pied. Alors « Join the team ».

Nom
Km
Place
Temps
Vitesse moy
Jean-Félix Chevassu
76
4
08:46:00
8,7 Km/h
Jean-François Magne
76
35
10:59:00
6,9 Km/h
Sébastien Trublin
50